La fête n’est pas tout à fait terminée pour les grands armateurs de porte-conteneurs, mais les nuages se dessinent à l’horizon. Après deux années marquées par une envolée historique, les taux de fret s’effondrent depuis le printemps. La baisse devrait se poursuivre dans les mois à venir en raison du fort ralentissement de l’économie et du commerce mondial, et de la bulle des profits de l’italo-suisse MSC (non publié), du danois Maersk, du français CMA CGM, du chinois Cosco ou le Hapag-Lloyd allemand va se dégonfler avec la normalisation du marché du transport maritime.
C’est dans ce contexte que le PDG de CMA CGM, Rodolphe Saadé, a présenté, vendredi 25 novembre, ses résultats financiers du troisième trimestre, qui restent à des niveaux très élevés : le bénéfice net du numéro trois mondial du transport par conteneurs a atteint 7 milliard de dollars (6,75 milliards d’euros), proche de celui de Maersk (8,9 milliards), pour un chiffre d’affaires de 19,9 milliards de dollars. Des bénéfices qui s’ajoutent aux 14,8 milliards du premier semestre et aux 17,9 milliards réalisés en 2021.
M. Saadé affiche sa volonté de poursuivre ses investissements pour » renforcer [ses] postes » et « accélérer [la] transition énergétique [de son groupe] »notamment avec la commande de navires propulsés au gaz naturel liquéfié, voire au méthanol. « Mais nous observons actuellement une baisse de la demande, qui entraîne une normalisation du commerce international, et une baisse importante des taux de fret »nuance le patron de CMA CGM dans un communiqué.
L’indice composite des taux de fret, calculé par le cabinet britannique Drewry, baisse en effet de semaine en semaine. Bien qu’il soit encore plus élevé qu’en 2019 – 1 420 dollars par conteneur de 40 pieds (12 mètres) – il est passé de son sommet de 10 377 dollars en septembre 2021 à 2 591 dollars aujourd’hui. Entre Shanghai et Le Havre, il est passé de 15 000 dollars à 3 000 dollars. Le ravitaillement en fioul a augmenté de 60% dans le même temps. Ce revirement, CMA CGM l’avait anticipé fin 2021. « La visibilité n’est pas énorme dans notre métiera alors indiqué l’un des patrons des lignes du groupe. Nos coûts fixes sont élevés, tandis que nos revenus peuvent fluctuer rapidement. »
Frénésie d’acquisition
Le groupe a gagné plus en 2020-2022 qu’entre 1978, année de sa création à Marseille, et 2020. Comme l’ensemble du secteur, qui a gagné plus sur cette courte période que depuis sa naissance, fin des années 1950, avec l’invention du conteneur. Selon Drewry, il a gagné 7 milliards de dollars en 2019, 26 milliards de dollars en 2020 et 210 milliards de dollars en 2021 ; il en attend 270 milliards en 2022. « C’est une situation unique dans une vie »confiait le patron de l’armateur allemand Hapag-Lloyd, Rolf Habben Jansen, au Financial TimesDébut septembre.
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